Baccalauréat 2023 : le succès atypique de la non-voyante Fatoumata Binta Barry

Article : Baccalauréat 2023 : le succès atypique de la non-voyante Fatoumata Binta Barry
Crédit: Saa Robert Kamano
19 juillet 2023

Baccalauréat 2023 : le succès atypique de la non-voyante Fatoumata Binta Barry

Conakry, le 15 juillet 2023 – Parmi les milliers de candidats ayant passé le Baccalauréat unique 2023 en Guinée, une histoire poignante émerge de la réussite exceptionnelle de Fatoumata Binta Barry. Malgré sa cécité depuis onze ans, la jeune femme qui ambitionne de devenir avocate a surmonté les obstacles et a réussi brillamment l’examen national. Elle décroche ainsi son billet pour l’université.

Le ministère de l’Éducation nationale et de l’Alphabétisation a rendu publics les résultats du Baccalauréat le samedi 15 juillet, révélant que sur les 93 468 candidats, 25 668 ont été admis, dont 8 442 filles. Parmi ces réussites remarquables, Fatoumata Binta Barry, une étudiante inspirante, a fait preuve d’une détermination sans faille malgré son handicap visuel.

Âgée de 23 ans, Fatoumata Binta Barry a été confrontée à un échec l’année dernière, mais cela ne l’a pas découragée. Armée de volonté et de ténacité, elle a relevé le défi avec brio cette année et s’est classée à la 1262ème place du classement national. Sa performance exceptionnelle a été récompensée par une mention Abien, soulignant son talent et son engagement envers ses études.

Photo by Medsile pour Iwaria

Un apprentissage difficile

Fatoumata Binta Barry, une étudiante guinéenne, a connu un parcours scolaire jalonné de défis suite à la perte progressive de sa vue en 2012, alors qu’elle était en classe de 9ème. Cependant, sa détermination à poursuivre ses études a été inébranlable. « Tout a commencé par des maux de tête, puis j’ai progressivement perdu la vue. Il m’a fallu du temps pour m’adapter à la situation et reprendre mes études. Mes débuts ont été très difficiles, car les écoles refusaient de m’accepter en raison de mon handicap. J’ai dû suivre une formation de trois ans pour apprendre le braille afin de pouvoir écrire sans voir« , raconte-t-elle.

Malgré ces obstacles, Fatoumata a persévéré en enregistrant les cours, les écoutant à la maison, et les rédigeant à sa manière en utilisant l’écriture braille. Elle a également dû chercher des romans et des brochures pour pouvoir étudier, car les documents en braille ne sont pas largement disponibles dans l’enseignement en Guinée.

Photo de Eren Li pour Pexels

Aujourd’hui, elle peut être fière de son succès, ayant réussi brillamment son Baccalauréat. Boubacar Aliou Bah, l’un des responsables de son école, partage cet enthousiasme et exprime son admiration pour Fatoumata : « L’année n’a pas été facile pour elle. Mais elle s’est battue contre vents et marées pour décrocher le Bac avec mention. Je suis animé d’un sentiment de satisfaction morale et de fierté. Malgré son handicap, si Binta a pu décrocher le Bac, pourquoi pas les autres. Elle doit être un modèle de réussite pour tous les élèves de notre pays.« 

Devenir avocate pour défendre les personnes vulnérables

Pour Fatoumata Binta Barry, décrocher son diplôme de Baccalauréat n’est qu’une étape vers la réalisation de ses rêves. Malgré sa cécité, cette jeune étudiante guinéenne nourrit une ambition inébranlable : devenir avocate pour défendre deux causes qui lui tiennent particulièrement à cœur : les femmes et les personnes handicapées.

Depuis son jeune âge, Fatoumata avait un fort penchant pour la défense des droits. Son désir ardent de soutenir les femmes dans leur quête d’égalité et d’émancipation est désormais doublé par sa propre expérience de non-voyante, la conduisant à défendre également les personnes handicapées.

Elle témoigne des difficultés auxquelles sont confrontées les personnes aveugles ou malvoyantes dans le système éducatif guinéen. « Lors des examens, nos sujets ne sont pas transcrits et on nous évalue aussi dans les mêmes conditions que les voyants. C’est tout à fait un calvaire », décrit la nouvelle bachelière.

Photo by AMISOM pour Iwaria

L’école, « la lumière des non-voyants »

Fatoumata Binta Barry, loin de se laisser abattre par son handicap visuel, a choisi de braver les difficultés pour poursuivre ses études. Pour elle, le handicap n’est pas une fatalité, et c’est avec une volonté inébranlable qu’elle s’est engagée dans le chemin de l’éducation.

« Aucun obstacle n’est insurmontable dans cette vie, » déclare-t-elle avec assurance. Plutôt que d’être un fardeau pour sa famille ou une charge pour la société, elle a préféré faire de l’école sa lumière en tant que non-voyante. Fatoumata Binta Barry croit fermement que l’éducation est le moyen de transcender les limites imposées par son handicap.

Elle réfute même l’étiquette d’aveugle, préférant se définir comme malvoyante ou non-voyante, soulignant ainsi la puissance de la connaissance et de l’alphabétisation pour briser les stéréotypes associés aux personnes en situation de handicap. « Lorsqu’on arrive à lire et à écrire, on n’est pas un aveugle, mais plutôt mal voyant ou non voyant. Un aveugle, c’est un illettré ».

Malgré son succès au Baccalauréat, Fatoumata Binta Barry est consciente que son parcours à l’université sera semé d’embûches. L’absence de romans adaptés en braille et de supports accessibles la contraint à rechercher activement des documents électroniques. En classe, elle enregistre les cours pour les réécouter à la maison afin de pouvoir résumer par elle-même.

Partagez

Commentaires